Avec l'intelligence artificielle, le métier de trésorier est-il en danger ?
Recueil des synthèses des vingt sessions des Journées de l'AFTE 2024
L’intelligence artificielle gagne en importance dans des secteurs sensibles aux données comme le b-to-c, tandis que l’industrie y est moins réceptive. Certaines entreprises l’intègrent déjà au coeur de leur fonctionnement : ses outils transforment en particulier le secteur de la santé en automatisant des tâches comme la transcription, le diagnostic et les interactions avec les patients.
Doctolib a recours à l’intelligence artificielle classique, mais aussi aux grands modèles de langage (forme générative), ce qui a révolutionné la gestion du personnel, mais encore le codage de la plateforme technologique, automatisé dans une proportion de 20 % à 30 %. Il est aussi question de robots conversationnels pour les centres d’appel, d’un système d’alerte en cybersécurité, ou d’améliorer le recrutement. L’impact est moindre dans la fonction finance, déjà bien automatisée.
Automatiser les tâches répétitives
L’intelligence artificielle transforme les métiers financiers en automatisant le traitement de grandes masses de données. En finance et en trésorerie, elle automatise les tâches répétitives, comme le reporting et la gestion documentaire, et libère ainsi du temps mis à profit par les financiers d’entreprise pour se concentrer sur la stratégie et la prise de décision. Selon Julien Badiola, de Korn Ferry, cette évolution nourrit une demande croissante pour des compétences en programmation, en modélisation et en gestion des données. Toutefois, les directeurs financiers ou du financement et de la trésorerie ne sont que rarement formés à cette technique et n’en mesurent pas toujours le potentiel. Aujourd’hui, les recrutements visent d’ailleurs surtout des responsables à qui l’on demande de se concentrer sur l’opérationnel et sur l’amélioration de la performance.
Spécialisée dans l’intelligence artificielle appliquée à la gestion du besoin en fonds de roulement, AiVidens propose des produits capables d’anticiper les problèmes de paiement, d’analyser les comportements et les risques et de prédire les paiements, détaille Édouard Beauvois. Les usages vont du recouvrement à la relance automatisée en passant par le cash management prédictif. Bien qu’efficaces, ces nouveaux outils nécessitent toutefois d’être enrichis par l’expérience pour optimiser les processus financiers.
Virbac fait usage de l’intelligence artificielle depuis que des collaborateurs ont testé des pilotes, explique Cherifa Hemadou. L’équipe finance a étudié divers cas pratiques : contrats de financement pour les trésoriers, analyse de la performance pour les contrôleurs de gestion, interprétation des normes IFRS en consolidation, génération de documents pour les recrutements. Pour obtenir de bons résultats, la rédaction des requêtes doit être précise, les analyses de gestion nécessitant de leur côté un nettoyage des données.
A noter : le groupe de santé animale limite l’accès à ces outils avec des licences restreintes afin de garantir une utilisation maîtrisée. De son côté, Doctolib dispose pour ses 2 800 collaborateurs d’une licence à 750 000 euros pour utiliser la plateforme Dust, qui conçoit des assistants spécialisés.
L’intelligence artificielle présente des limites, notamment en ce qui concerne la gestion des données sensibles et la nécessité d’expliquer ses décisions. Elle ne doit pas remplacer l’humain dans les interactions clés, ni un esprit critique, tandis qu’une bonne organisation et l’intuition humaine demeurent indispensables pour valider les résultats et prévenir l’obsolescence de l’entreprise.
🎤 Ils ont pris la parole lors de cette session
Julien Badiola, Korn Ferry
Edouard Beauvois, AiVidens
Chérifa Hemadou, Virbac
Pierre Vergnes, Doctolib
🗣️ Ils ont animé les échanges
Justine Domovic, L'Oréal
Ignacio Sanchez-Miret, Emera Group