Les pistes d'application de l'IA en gestion de trésorerie

janvier 2025
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Auguste Grignon Dumoulin
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L’intelligence artificielle n’irrigue pas à la même vitesse tous les métiers financiers. Si la technologie est intégrée depuis des années dans les algorithmes de finance de marché, elle s’impose encore timidement en gestion de trésorerie. Ce ne sont pourtant pas les cas d’usage qui manquent.

C’est pour en discuter que plusieurs experts se sont réunis aux Journées de l’AFTE 2024 lors d’une conférence liant les thèmes de l’IA et de la trésorerie. Ils ont évoqué différentes applications telles que la prévision des données, la cybersécurité ou encore l’accès facilité à des informations.

Prévision

La prévision des données de trésorerie est ressortie comme le champs d’application principal. « On a déjà vu des sociétés sanctionnées par les marchés parce-que leur free cash-flow était supérieur à ce qu'elles avaient annoncé. Il ne faut donc pas même faire mieux que prévu, mais simplement ce qui était prévu », a déclaré Antoine Fulpin, fondateur de Dizavel Partners. Pour cela, le recours de modèles alimentés par l'IA peut permettre d'obtenir des prévisions plus fiables, en nettoyant notamment au préalable les données.

Ces modèles seraient en mesure de réduire les taux d’erreur jusqu’à 50% par rapport aux méthodes traditionnelles, rapporte J.P. Morgan. Le traitement simultané de centaines de paramètres explique cela, comme les tendances de ventes, des indicateurs économiques, les variations saisonnières, les perturbations dans les chaînes d'approvisionnement... Cerise sur le gâteau : les modèles sont capable de détecter des changements subtils dans les données.

Leurs capacités de reconnaissance dépassent ainsi celles d'un être humain, d’autant qu’elles sont capables d’extraire des informations sur les réseaux sociaux sur le sentiment du marché, les changements réglementaires et les événements géopolitiques, tous susceptibles d'affecter les flux de trésorerie.

Ces outils devraient permettre, à terme, de gagner en granularité dans l’analyse des données. Les trésoriers gagneraient une meilleure visibilité, de même pour leurs parties prenantes. Le risque de crédit sera par exemple plus finement évalué, ce qui affectera les réserves que doivent provisionner les banques lors d’un prêt et donc les montants finalement prêtés. L’activité de trésorerie sera donc directement impactée par ces évolutions.

Cybersécurité

La cybersécurité figure également parmi les cas d’usage. Entre 2023 et 2028, la fraude au paiement en ligne devrait dépasser les 362 milliards de dollars dans le monde, anticipe Juniper Research, avec un quart des arnaques sur la seule année 2028. Le cabinet précise que de nouvelles menaces vont émerger, s’appuyant sur une utilisation accrue de l’intelligence artificielle.

Les modèles analysent de plus en plus de données et composent des attaques toujours plus sophistiquées. Elles deviennent plus difficiles à détecter pour un être humain (on peut penser aux IA qui reproduisent la voix et l’image d'un directeur d’entreprise dans une réunion Teams), ce qui pourrait pousser à s’appuyer sur ladite technologie pour reconnaître les schémas frauduleux. « Cela permettrait de renforcer les processus du trésorier et d’aider à sécuriser les flux opérationnels », estime Alexander Lazarevic, responsable des opérations de trésorerie chez L'Oréal.

Autres applications

Enfin, d'autres applications peuvent paraître plus communes mais avec une nouveauté, qui réside dans le fait qu’elles sont désormais accessibles sans avoir à coder. Il est par exemple possible d’optimiser la centralisation de sa trésorerie (cash sweeping), de chercher des informations précises dans un large corpus de textes juridiques, ce qui peut réduire les frictions entre des filiales étrangères et une maison mère ou encore de faire des analyses comparatives entre des dizaines de rapport en un temps record.

« On peut désormais faire une requête dans notre propre langue à une IA pour mettre en place ces tâches. Cela peut paraître anodin mais les gains de temps sont considérables. La seule chose à faire est de demander à une IA générative de coder la solution », a indiqué Manuel Costescu, managing director chez J.P. Morgan.

Conclusion

A bien y regarder, les applications de l'IA dans le domaine de la trésorerie sont plus de l'ordre de l'optimisation que de la révolution. Cela explique en partie l'arrivée relativement tardive de la technologie dans le quotidien des trésoriers. Pour autant, personne ne remet aujourd'hui en cause la digitalisation des systèmes. L'IA n'en constitue qu'une marche de plus.

« À l'avenir, l'IA devrait être au cœur d'un nouveau système d'exploitation de la trésorerie en favorisant l'automatisation, l'efficacité, la précision et la connaissance des données. Le catalyseur le plus important sera la capacité des trésoriers à faire des choix difficiles, mais nécessaires pour provoquer un changement », conclut la banque Citi dans un rapport publié en décembre sur le métier de trésorier en 2030.

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