Fitch abaisse la note de la France, pas d’effet immédiat sur les entreprises françaises
La France est désormais notée ‘A+’ par Fitch. Les grandes entreprises françaises ne sont pas impactées par cette décision, qui pourrait néanmoins toucher certaines entreprises « high yield », d’après l’agence. Les prochaines échéances interviendront les 24 octobre et 28 novembre prochains, avec les verdicts respectifs de Moody’s et S&P.
La sanction est tombée le 12 septembre. L’agence de notation Fitch Ratings a abaissé la note de la France de ‘AA-’ à ‘A+’, en raison de la hausse de sa dette publique et d’un environnement politique divisé qui complique la mise en place de réformes fiscales. Les perspectives sont passées de « négatives » à « stables ».
Cette annonce a été accueillie sans grande réaction de la part des marchés, qui s’attendaient largement à cette rétrogradation. L’écart entre les taux à 10 ans français et allemand n’a pratiquement pas bougé, restant autour des 80 points de base ; un niveau retrouvé début septembre avec l’annonce du vote de confiance de l’ex-premier ministre François Bayrou. Il avait été atteint pour la première fois lors de la dissolution de l’Assemblée nationale en juin 2024.
D’autres agences de notation ont emboîté le pas à Fitch. Le 19 septembre, Morningstar DBRS a également dégradé la note française de AA (High) à AA et relevé la perspective de « négative » à « stable ». Le 26 septembre, Scope Ratings a confirmé sa note française à AA- mais a révisé la perspective de « stable » à « négative ». A chaque fois, les agences reprochent le manque de stabilité politique qui empêche la mise en place de réformes fiscales et budgétaires efficaces.
Pas d’effet sur les grandes entreprises
Le coût de la dette française sur les marchés s’établit désormais autour de 3,4%, après un pic à 3,6%. Le spread entre la France et l’Allemagne évolue au même niveau que celui entre l’Italie et l’Allemagne. La hausse illustre une prime de risque accrue, mais reste en dessous des niveaux observés lors de la crise des dettes souveraines. « La dette française continue d’être jugée de bonne qualité », observe dans une note Mabrouk Chetouane, directeur stratégie marchés internationaux à Natixis Investment Managers Solutions.
Cette dégradation n’entraîne pas d’effet immédiat sur la notation des grandes entreprises françaises dans la catégorie « investment grade » et dont l’activité est internationalisée. Cette exposition internationale permet justement une décorrélation de leur note de crédit du risque souverain français et dépend dès lors de la situation économique de leur secteur d’activité respectif.
D’autant que les 50 grandes entreprises françaises suivies par Fitch affichent toutes une note inférieure à celle de la France (à l’exception de Michelin qui est notée ‘A’). Plusieurs grands groupes français notés par Standard & Poor’s et Moody’s, comme LVMH, Airbus, L'Oréal et Axa, empruntent à des taux désormais inférieurs à ceux de l'État français. « Le contraste souligne à la fois la confiance accordée à ces entreprises et la pression exercée sur la dette souveraine par l’excès d’offre et le volume massif de dette publique émise », commente dans une note Michaël Nizard, responsable multi-asset et overlay à Edmond de Rothschild Asset Management.
Seule EDF dispose d’une note corrélée à celle de l’Etat français, faisant potentiellement de l’énergéticien l’entreprise la plus exposée. « Mais ce n’est aujourd’hui pas le cas, sa perspective ayant été relevée de « négative » à « stable » par Fitch le 19 septembre dernier en raison du caractère vital d’EDF dans le programme nucléaire français », précise Emmanuel Bulle, directeur senior, responsable de la recherche sur les entreprises EMEA à Fitch Ratings.
Banques et assurances
De leur côté, les banques ont une exposition modérée à la notation de la France. Il ne devrait pas y avoir d’impact à ce stade sur les notations du secteur bancaire, dont les perspectives restent stables selon Fitch.
L’agence souligne également que la dégradation n’a pas eu « d’incidence significative sur les conditions d’exploitation » des assureurs français, rapporte le journal Les Echos. Leurs notations restent elle aussi stables, ces derniers étant moins exposés à la dette française que leurs homologues européens. Si leurs provisions étaient au minimum légal, ils devraient toutefois provisionner plus de capital compte tenu de l’augmentation du risque perçu.
Cela pourrait donc conduire à des arbitrages en défaveur des obligations françaises, car l’argent provisionné est de l’argent qui n’est pas investi. De même pour les banques françaises. Fitch ne s’attend cependant pas à de fortes reventes de dette française, qui reste encore bien vue par les investisseurs.
Faible croissance
Les entreprises françaises notées « high yield » et opérant dans des secteurs liés à la consommation des ménages (télécommunication, construction, immobilier) devraient le plus souffrir du renchérissement du coût de la dette publique, qui se répercutera sur les ménages. Les chiffres d’affaires seraient impactés et c’est pour cette raison que Fitch a révisé ses anticipations de croissance à la baisse pour la France en 2025, à 0,6% contre 1,2% auparavant, soulignant également l’impact des nouveaux tarifs douaniers américains.
L’agence de notation ne croît pas non plus en la capacité de la classe politique à dégager une majorité d’ici à 2027, ce qui se traduit par un déficit public s’établissant au-dessus des 5% jusqu’à l’après-élection présidentielle. Il s’agit actuellement du plus haut taux dans la zone euro. Cette situation peut contraindre le pays dans sa capacité à répondre aux futurs chocs, surtout dans un contexte de faible croissance.
« L'incertitude actuelle pesant sur la politique et les réformes pourrait se ressentir sur le climat économique, mais le taux d'épargne élevé des ménages français et la solidité du bilans des entreprises devraient soutenir la consommation et l'investissement, en particulier au vu de la faible inflation », fait néanmoins valoir Fitch.
Les prochaines échéances en matière de notation interviendront les 24 octobre et 28 novembre prochains, avec les verdicts respectifs de Moody’s et S&P.
A découvrir également |