Sortir de l'impasse KYC
Un combat nécessaire, dont le coût pour les entreprises doit être maitrisé. La lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme est un combat essentiel pour prévenir les activités criminelles et assurer la solidité de notre système économique et financier. L'Union européenne n'a pas ménagé ses efforts avec 5 directives déjà adoptées et une 6ème en préparation, ainsi que la création prochaine d'une Autorité européenne dédiée. Après trop d'années d'immobilisme, il est temps pour les entreprises de se saisir de ces pistes de solutions. Un combat indispensable ne doit pas se transformer en frein paralysant pour l'activité économique !
Même si la situation est loin d’être satisfaisante, beaucoup de chemin a été parcouru en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. L’Union européenne, par exemple, a déjà produit cinq directives, se prépare à en adopter une sixième et à se doter d’une Autorité européenne de lutte contre le blanchiment de capitaux.
Mais ce combat, nécessaire pour prévenir les activités criminelles en les privant de fonds et pour assurer la solidité, l'intégrité et la stabilité du système économique et financier, a un prix : les dispositions prises en son nom érigent une succession d’obstacles entre les entreprises et leurs partenaires bancaires et financiers, à qui la loi demande de recourir à une identification précise de leurs clients.
Une tâche chronophage
Cette identification répond à la formule « connaître son client », soit Know your customer et son sigle KYC en anglais. Elle représente pour les trésoreries une tâche à faible valeur ajoutée, mais encore chronophage, ardue et désespérante, dans la mesure où chaque banque exige sa propre liste de documents, certificats, attestations, etc. Satisfaire à ces demandes nécessite souvent un emploi à temps plein pour les entreprises d’envergure internationale multi bancarisées et représente dans tous les cas un fardeau administratif de plus en plus lourd, quelle que soit la taille des entreprises.
Des solutions, alliant dématérialisation des documents et standardisation des contenus et des formats, sont proposées, l’une par l’industrie bancaire regroupée sous une même bannière, les autres par les établissements bancaires pour leur propre compte. Mais ni l’une ni les autres ne sont satisfaisantes et une solution globale n’existe pas.
La première aurait permis aux entreprises de communiquer avec un très grand nombre de banques, ce qui aurait constitué une avancée spectaculaire, mais elle est désormais silencieuse et beaucoup la perçoivent comme un échec de plus. Le défaut majeur des secondes tient au fait qu’elles sont monobanques et conçues d’abord par et pour leurs propres besoins. Les banques ne sont pas prêtes à transiger pour que s'instaure un minimum de mutualisation.
Le temps de l'action
Après des années de rendez-vous parfois manqués, il est temps pour les entreprises de prendre le taureau par les cornes, cela en opérant sur deux fronts.
Le premier consiste à faire la promotion du legal entity identifier (LEI), ou identifiant d’entité juridique, devenu robuste et global, et qui pourrait avantageusement se substituer aux trop nombreux autres identifiants utilisés par les établissements financiers.
Ces derniers pourront asseoir leurs vérifications en capitalisant le développement de la version numérique du LEI, le VLEI, véritable passeport numérique et harmonisé de l’entreprise. Ajoutons que le LEI ou le VLEI pourraient être des alliés précieux dans l’actuelle discussion sur l’identification des parties dans les paiements transfrontaliers.
Le second front consiste à soutenir des initiatives locales de mutualisation et de numérisation du KYC – celle du tiers de confiance Conformitee par exemple – visant à mettre à la disposition des entreprises et de leurs banques un outil de collecte d’information facile à utiliser, modulable, et en tout état de cause à la main de l’entreprise. Des banques de premier plan, à l’écoute de leurs clients, ont commencé à s’associer à ces initiatives. Le train est en marche : prenons-le !
Par Noëlle Belmimoun, présidente de la commission « Conformité » de l’AFTE - Point de vue de La Lettre du trésorier de février 2024
Pour la consulter (réservé aux abonnés) : https://www.afte.com/indices-de-reference-transition-suite-et-fin